Le 7 juin 1976 la revue américaine Time décria une dégustation faite à Paris où 11 juges (9 connaisseurs français, l'organisateur Steven Spurrier et une femme américaine) comparèrent 4 grands vins de Bordeaux et 6 de la Californie. Time déclara : « The unthinkable happened : California defeated all Gaul ». Faut-il accepter (ce qui est aujourd'hui nommé) « le jugement de Paris » ?
Ce jugement dépend de la procédure pour (1) solliciter les avis des juges et puis (2) de les amalgamer dans un opinion du jury. La procédure utilisée était parmi les plus mauvaises ; en fait, Gaul avait gagné.
Le même problème se pose régulièrement dans toutes instances où il faut ranger des compétiteurs et déclarer un gagnant : patineurs artistiques, gymnastes, chiens, restaurants, postes de professeurs universitaires, reines de beautés, etc., et, bien sur, candidats à la présidence de la France.
L'exemple du jugement de Paris permet d'expliquer l'essence de la théorie du jugement majoritaire et comment une seule procédure acceptable émerge. L'exemple de l'élection présidentielle française de 2012 montre pourquoi les résultats du scrutin majoritaire à un ou deux tours mesurent mal l'opinion de l'électorat alors que du jugement majoritaire – en permettant à chaque électeur d'exprimer pleinement ses évaluations des candidats – ressort une mesure bien plus précise.
Références :
Michel Balinski et Rida Laraki, Majority Judgment : Measuring, Ranking, and Electing, MIT Press, 2010.
___ et __, « Jugement majoritaire versus vote majoritaire (via les présidentielles 2011-2012) », Revue française d'économie XXVII (2013) 11-44.
___ et __, « How best to rank wines », in E. Giraud-Héraud and M.-C. Pichery (eds.), Wine Economics : Quantitative Studies and Empirical Observations, Palgrave, 2013, 149-172.